Interview pour "Sadique Master"
Publié dans Correspondances, interviews
III:
Sadique Master : Et à contresens, quelle influence ce cinéma peut-il exercer sur un esprit ou sur un inconscient collectif ? Pourrait-il banaliser l’acte, lui attribuer de la proximité, favoriser une position morale ? C’est en quelque sorte LA question, et vous êtes surement les mieux placés pour la démystifier.Â
Nicolas : Il y a un IMMENSE gouffre entre fantasmer un acte violent (en regardant un film, en lisant un livre etc) et le commettre. La plupart des tueurs en série sont déçus par la réalité de leurs meurtres, comparée à ce qu’ils avaient fantasmé. Et c’est d’ailleurs parfois pour cela qu’ils recommencent, pour arriver à quelque chose de satisfaisant, en quelque sorte. Il est indéniable que voir des vrais meurtres (chose inimaginable il y a vingt ans, puis banalisée par l’usage d’internet) peut peut-être émousser la sensibilité de quelqu’un qui a déjà à la base une prédisposition pour la violence. Mais cette prédisposition est ancrée là depuis l’enfance. On dit souvent de Ted Bundy qu’il était influencé par la pornographie. Ce n’est pas tout à fait exact. Il consommait surtout des revues de bondage, et des récits de faits divers dans les magazines True Detectives de l’époque. Le support était là , mais l’attirance pour ce support venait d’un petit monstre qui lui rongeait les neurones depuis la maternelle. S’il avait grandi aujourd’hui, le petit Bundy aurait passé son temps à regarder les vidéos d’exécutions des cartels mexicains. Mais cela n’aurait pas amplifié son désir de tuer des femmes, qui venait d’une zone de son cerveau que les neuropsychiatres ont grand peine à identifier.